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Le Point.fr : François Hollande a demandé que la taxe à 75 % sur les grosses fortunes soit "réaménagée, sans changer son objectif". Comment est-ce possible ?
Christian Eckert : Commençons par rappeler l'objectif, qui est dissuasif. Nous ne cherchons pas à percevoir un impôt pour alimenter le budget de l'État, mais à éviter que des salaires supérieurs à un million d'euros par personne ne soient versés. Ce sont ces salaires exorbitants, en période difficile où on demande des efforts à tout le monde, qui choquent les Français. Alors, cette taxe, c'est une amende plus qu'un impôt. Nous disons : Si vous dépassez la ligne jaune, vous payez. La préoccupation du Conseil constitutionnel est que la taxe à 75 % est prévue pour être prélevée sur les revenus des individus, alors que l'impôt est censé être prélevé sur les foyers, nous pourrions donc avoir un regard familialisé sur le sujet.
François Hollande est supposé être un spécialiste de la fiscalité. Cela paraît surprenant qu'il n'ait pas anticipé la décision du Conseil constitutionnel...
Cela vient de l'ambiguïté de départ. Le Conseil constitutionnel a considéré qu'il s'agissait d'un impôt, alors que le Parlement - et François Hollande aussi - a considéré que c'était une taxe dissuasive, temporaire puisque prévue pour durer deux ans, donc exceptionnelle, et qu'on n'avait pas à lui fixer les règles de l'égalité devant l'impôt. D'ailleurs, il existe d'autres mesures fiscales individualisées. Au mois deux sont bien connues, la CSG et la prime pour l'emploi, calculée par salarié. Donc la réaction du Conseil constitutionnel n'était pas forcément prévisible sur cet aspect-là. Mais en se prononçant sur le mode de calcul, le Conseil constitutionnel a évité, contrairement à ce que dit la droite, de se prononcer sur l'aspect confiscatoire. C'est probablement la plus grande difficulté que l'on va avoir pour reconstruire un dispositif. On peut craindre que si l'on passe par l'impôt dans la nouvelle version le Conseil constitutionnel explique que la taxe est confiscatoire, puisque c'est ce qu'il a fait pour la taxation des bénéfices sur les stock-options et sur les retraites-chapeaux (qui tournaient autour de 75 %, NDLR).
Pensez-vous que le gouvernement doit s'accrocher au symbole ou peut-il abandonner la mesure sans fracas ?
C'est une mesure symbolique, qui ne rapporte pas énormément d'argent, 200 millions d'euros par an, alors que l'on nous a laissé des déficits abyssaux. Mais les Français sont très attachés au symbole. C'est une des mesures qui a recueilli le plus d'adhésion dans les études d'opinion. Elle a joué un rôle important durant la campagne électorale. Donc il faudra reconstruire une mesure de ce type. On peut, par exemple, imaginer de cibler les entreprises qui pratiqueraient des salaires supérieurs à un million d'euros, soit en annulant les réductions de charges, soit en les amputant du crédit d'impôt-compétitivité. De toute façon, il n'y a pas le feu, il n'y a pas de projet de loi de finances dans les prochaines semaines, ni même dans les prochains mois. Il faut s'habituer dans ce pays à ce que le Parlement prenne un peu de temps pour légiférer.
Si c'est une mesure pour dissuader les entreprises de distribuer de hauts salaires, pourquoi ne pas plafonner les salaires par la loi ?
C'est une piste que l'on utilise dans les entreprises où l'État a des participations majoritaires. On a plafonné les salaires des dirigeants. Mais après, c'est toujours pareil, on nous oppose la concurrence internationale et la liberté d'entreprendre. Sans parler de quelques Gérard Depardieu...
Allons, allons monsieur Eckert, pas à nous ce genre de propos. Un impôt, sur les riches, point. L'art de détourner la conversation sur une loi mal ficelée et sanctionnée par le Conseil Constitutionnel. Si il y a amende, il devrait y avoir une infraction, n'est-ce pas monsieur Eckert ? Les riches ont-ils commis une infraction ? Le président normal n'aime pas les riches, au dessus de quatre mille euros (4000).
"Commençons par rappeler l'objectif, qui est dissuasif. Nous ne cherchons pas à percevoir un impôt pour alimenter le budget de l'État, mais à éviter que des salaires supérieurs à un million d'euros par personne ne soient versés. "
Nous commençons à y voir plus clair sur les véritables intentions des socialistes et ce n'est franchement pas rassurant. Quel gouvernement, dans une démocratie, peut prétendre fixer arbitrairement le montant maximum d'un salaire ? Selon quels critères ? Lorsqu'un gouvernement se substitut à une relation appartient ici à la sphère de l'entreprise privée, pour y imposer un dictat purement idéologique, nous franchissons une ligne jaune qui, bien souvent, est le signe annonciateur d'autres règles liberticides. Et tant pis si ces "règles" produisent les effects exactement contraires en appauvrissant la France, diminuant notre compétitivité et creusant un peu plus notre tombe. C'est ce genre de raisonnement qui mène à la "route de la servitude" comme l'écrivit l'économiste Friedrich Hayek qui a de quoi vous glacer le dos. .
Pour ne pas dire effarant que le Rapporteur de la Commission des Finances lui-même ose utiliser publiquement le terme "amende" s'agissant d'un dispositif fiscal ! Les mots ont un sens et une amende constitue la sanction d'une infraction : la richesse en serait-elle une ? La question intéressera sans doute le Conseil Constitutionnel si d'aventure il doit examiner une nouvelle mouture du texte...