Le premier but de Paris dimanche soir prête à débat, du fait de la position de hors-jeu de Matuidi, finalement passeur décisif. C'est à signaler, le titre de ce papier est emprunté à Canal+ qui a fait un vrai effort de pédagogie ce week-end sur l'arbitrage. Et Ménès n'a rien dit ou presque...


Il y a 3 ans et demi, le but refusé à Bergessio dans une situation un peu similaire (ballon dévié/taclé par le défenseur) contre Lorient avait déjà fait parler. Et la lecture du topic du live de dimanche montre que ce souvenir est toujours présent dans les mémoires. À l'époque, cela avait donné une chronique ici-même.

À Paris, donc, le hors-jeu n'a pas été signalé. Ou plutôt, si, il l'a été, mais l'arbitre central, Lionel Jaffredo, a choisi de déjuger son assistant qui avait levé son drapeau. Sur la capture ci-dessous, on voit nettement le geste de l'arbitre à destination de son assistant pour lui indiquer qu'il laisse jouer. Dans l'oreillette, il doit être en train de lui dire que le ballon est envoyé par un défenseur vert au joueur en position de hors-jeu. Cela rajoute à la confusion, mais il en a parfaitement le droit. La Loi 5 précise que l'arbitre est le seul décisionnaire final et a le pouvoir de ne pas suivre la signalisation de son assistant. En l'occurrence, l'assistant n'est pas en mesure de voir qui a passé le ballon, ce qui justifie que le central le déjuge. Dernier point, ce drapeau levé puis baissé n'a semble-t-il pas influé sur la défense – poreuse et malchanceuse – des Verts puisque personne ne s'est arrêté de jouer.




Tirer avantage ou recevoir le ballon d'un adversaire ?

Ceci posé, qu'en est-il du jugement de ce hors-jeu ? Comme d'habitude, repassons l'action à l'écrit. Suite à une perte de balle évitable après une touche en faveur de l'ASSE, Ibrahimovic tente de transmettre à Matuidi en profondeur. Il est contré par Bayal mais bénéficie du contre favorable et tente de dribbler le Sénégalais. Le petit pont ne passe pas et Sall dévie le ballon qui échoit à Matuidi. Après son premier appel, l'international français était en position de hors-jeu. Il rendra le ballon (avec beaucoup de réussite) à Zlatan pour le premier but du match.

L'enjeu n'est donc pas de savoir si Matuidi était bien en position de hors-jeu, mais de déterminer s'il était justifié de ne pas le sanctionner. On le sait, « recevoir le ballon d'un adversaire » est un cas invalidant un hors-jeu. Mais, dans le même temps, parmi les cas de la fameuse règle « tirer avantage de sa position », on trouve « jouer le ballon qui a rebondi sur ou a été dévié par un adversaire dans sa direction ». En clair, il est demandé de distinguer l'action où un défenseur passe en retrait au joueur hors-jeu de celle où il détourne la passe d'un attaquant. Dans le premier cas, il n'y a pas hors-jeu alors que dans le second, le joueur est sanctionnable. En théorie, cette distinction est simple. En pratique, la difficulté se trouve dans les cas comme celui de dimanche où Bayal n'a ni vraiment « dévié » une passe de Zlatan, ni vraiment effectué un « geste technique » maîtrisé.


Depuis quelques années, des consignes et précisions ont été apportées au sujet de l'application de « tirer avantage ». Pas plus tard que cette année, une ultime circulaire (la 11.04) précise :
L'application de ce texte sera effectuée de la manière suivante :
1) Le défenseur n'a, à aucun moment, cherché à toucher le ballon, le contact entre ce défenseur et le ballon est totalement fortuit : l'attaquant sera sanctionné d'un hors-jeu. Ce cas ne concerne pas l'action de dimanche, Bayal cherchant visiblement à disputer le ballon à Ibrahimovic.
2) Le défenseur a cherché à jouer le ballon mais, compte tenu de la position du ballon et de sa vitesse, il n'a pu, finalement, que provoquer une déviation de la trajectoire du ballon : l'attaquant sera sanctionné d'un hors-jeu. Un cas  envisageable pour cette action. Bayal a un geste réflexe pour éviter de prendre un petit pont et détourne le ballon.
3) Le défenseur a effectué un geste technique réussi qui a modifié la trajectoire du ballon : pas de hors-jeu. Ce cas concerne plutôt un tacle ou un contrôle, voire une tête, mais, à la rigueur, il est aussi défendable de dire que l'objectif de Bayal étant d'intervenir et de prendre le ballon à Zlatan, son geste est donc réussi.
4) Le défenseur a manqué un geste technique par sa propre maladresse – ndr : le terme de maladresse n'a en aucun cas un sens péjoratif dans les textes de règlement – sans que cela soit dû à la position du ballon, ni à sa vitesse et sans que cela ne soit dû à la présence d'un adversaire : pas de hors-jeu. Là encore, cette interprétation est défendable puisque Bayal fait bien un geste du pied gauche qui ressemble à un dégagement manqué.

L'interprétation de l'arbitre se focalise donc sur un élément : l'intervention de Bayal est-elle un « geste technique » réussi ou non ? En direct, dans une action confuse et depuis sa position en retrait, l'arbitre a visiblement penché pour le troisième ou quatrième point. La conclusion qu'on doit en tirer est la même que celle de l'intervenant à la mi-temps sur Canal+ : on est aux « frontières de l'interprétation », un cas où aucune décision n'est totalement valable, ni totalement erronée. La tendance actuelle plaide simplement en faveur d'une validation de ce but, comme celui de Bergessio aurait dû l'être – Piccirillo reconnaissant ce jour-là son erreur.

 

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